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On se reverra à Noël - Chapitre 20

Les Romantiques - 22/12/2015

Chapitre vingt

Vainqueurs par valeur ou par ruse,
Le succès sera notre seule excuse.

 

Lorsque tout le monde fut bien installé autour de la table, Agatha se servit généreusement. La construction du bonhomme de neige, ajoutée à sa ballade en ville, lui avaient donné grand-faim. Sa mère la regardait sévèrement et Nathan lui dit d’une voix impatiente :

- Alors, qu’étais-tu allée faire en ville, et pourquoi ne nous as-tu pas prévenus ?

La jeune fille commença à couper un morceau de rosbif puis répondit :

- La dernière fois qu’on était descendus au bourg, j’avais remarqué que Billy avait toujours autant de peine avec son père. J'avais aussi remarqué que Jack était très serviable avec lui.

Elle se tourna vers Elvira :

- D’ailleurs il me semble que je t’en ai fait la remarque.

- Oui, c’est vrai, répondit son amie.

- Donc, sur le moment, j’ai trouvé cela curieux. Surtout qu'il n’y a pas si longtemps de ça, Jack avait tourné ce pauvre Billy en dérision en lui parlant de son ivrogne de père.

- Viens-en au fait, reprit Nathan.

Agatha mit dans sa bouche un morceau de pomme de terre, qu'elle mâchonna avec délices. Elle prenait plaisir à faire durer le suspense.

- J’avais fini par oublier cette scène. Après tout, il y a eu depuis d’autres choses qui ont retenu mon attention.

- Agatha ! Je t’en prie, dit sa mère.

- C’est bon, c’est bon, j’y arrive ! Plus tard, après avoir lu ce livre sur Sherlock Holmes, j’ai repensé à cette scène et je me suis dit qu’il devait y avoir une raison pour que les deux garçons se comprennent et, de là à ce qu'ils soient complices, ce ne fut qu’un pas que j’ai allègrement franchi.

Elle prit une gorgée d’eau avant de continuer :

- Donc aujourd’hui, cela m’avait tellement travaillée que j’ai décidé d’en avoir le cœur net et d’aller voir Billy. Je ne vous ai rien dit car je savais ce que vous en penseriez. Toi maman, tu m’aurais conseillé de ne pas me mêler d’affaires de cette sorte, et toi Nathan, tu aurais dit que j’ai une imagination débordante. C'est pourquoi il fallait que je prenne moi-même les choses en mains.

- Tu es donc allée voir Billy ? demanda son frère.

- Oui. Je m’étais souvenu que j’avais laissé, il y a deux semaines, une paire de bottines qui avaient grand besoin d’un ressemelage, j’ai donc rencontré Billy. L’air de rien, j’ai commencé à parler des santons disparus et je lui ai fait comprendre que toi, Nathan, tu pensais que c’était quelqu’un du pays. Il était nerveux. Je lui ai aussi dit que, si le voleur allait se présenter de lui-même, tu fermerais les yeux en l’honneur de Noël qui est, comme on le sait, la fête de l’amour et du pardon.

- Et alors ? demanda Elvira.

- J’ai payé mes bottines et je suis partie.

Nathan sourit en regardant sa sœur.

- Donc il n’a pas avoué ? Belle enquête ! se mit-il à ricaner.

Agatha, sans se mettre en colère, continua à manger posément avant de répondre :

- Nathan, tu n’as rien compris ! J’ai posé un jalon. J’ai attendu que mes paroles fassent leur chemin dans sa pensée, et je parie avec toi qu’il viendra te ramener les santons en personne, plein de contrition.

Nathan faillit s’étrangler avec son vin en entendant cette assertion, dite d’une voix posée.

- Vraiment ? Tu ne doutes de rien ! En tout cas, à partir de maintenant j’espère que tu auras la politesse d’informer ta mère et moi de tes futurs déplacements. Cela nous évitera de nous faire du souci.

- C’est entendu, répondit Agatha, et la discussion fut close.

Après le repas, Nathan entraîna le baron dans son bureau et demanda, très officiellement, la main de sa fille. Celui-ci, enchanté, lui donna en retour très officiellement son accord. Après avoir fait part aux dames de la nouvelle, on décida de la date. Il y eut bien quelques récriminations en entendant Nathan proclamer qu’il allait épouser Elvira pour le premier de l’an, mais on n’avait besoin de personne pour fêter l’évènement et, au printemps, on pourrait donner une grande fête pour le reste de la famille ! Après quelques remarques sur la rapidité de cette noce, on décida qu’après tout, si Nathan ne voulait pas attendre, à Dieu va !

Le lendemain les oranges n’étant toujours pas arrivées, Nathan décida d’aller jusqu'à Chichester dans la grande berline, et d’emmener avec lui Elvira et Agatha. La comtesse et la baronne n’étaient pas vraiment d’accord pour que de tout jeunes fiancés restent sans chaperon. Agatha s'insurgea : elle ferait un chaperon très valable. Mais les deux mères en doutèrent fortement. Nathan trancha la question en mettant en avant que, de toute façon, Elvira serait sa femme dans une semaine. Et ce matin du 23 décembre, l’attelage s’ébranla. Gulliver les accompagna en jappant à côté de la voiture, sa façon très personnelle de leur souhaiter un bon voyage.

Nathan était un peu frustré, il ne pouvait pas badiner tranquillement avec son amoureuse car sa sœur, un peu humiliée qu’on ne croie pas en ses qualités d’accompagnatrice, s’efforçait de les garder à l’œil afin de prouver qu’elle était un chaperon tout à fait acceptable.

- Il ne te manque plus qu’un chignon serré, une robe grise et un parapluie, et tu ressembleras à la duègne classique, lui dit Nathan.

Agatha lui tira la langue. Il secoua la tête et rétorqua, amusé :

- Ceci n’est vraiment pas digne d’un chaperon qui se respecte.

Enfin ils arrivèrent au port de Chichester. Il y avait beaucoup de monde, les magasins semblaient les appeler à s’y précipiter. Agatha résista stoïquement pendant dix minutes mais, lorsqu’elle vit à la devanture d’une boutique un chapeau qui semblait lui faire signe, elle se tourna vers son frère.

- Je sais que tu as envie d’entrer là-dedans, lui dit Nathan, ne te gêne pas. Pendant ce temps j’irai dans les bureaux du port, voir où sont passées nos oranges. Je reviendrai te chercher après, ne t’éloigne pas trop.

- Tu viens Elvira ? demanda Agatha en se précipitant vers le magasin.

Mais Nathan, qui retenait la jeune fille par la main, lui fit un signe discret.

- Tu sais Agatha, j’ai vraiment envie de voir les bateaux de près.

Mais son amie était déjà en train d’essayer le couvre chef. Nathan sourit à Elvira avant de l’entraîner vers le bureau du chef de port.

Rapidement on lui indiqua où trouver sa marchandise. Il entra dans l’entrepôt où étaient stockées beaucoup de denrées différentes et trouva ce qu’il cherchait. Mais au lieu de prendre le caisson d’oranges ou d’appeler un docker pour qu’il les lui porte, il entraîna Elvira derrière une colonne de caisses empilées et se mit à l’embrasser. Glissant ses mains sous son manteau qui s'était ouvert, il caressa ses seins. Elle soupira de plaisir.

- Je serais devenu fou si je n’avais pas pu t’embrasser.

- Alors continue, répondit Elvira, je ne veux pas être responsable de ta folie.

- Mais tu l’es quand même. Une douce folie.

Il continua à l’embrasser et à la caresser.

- Ah ! Mon Dieu, comme j’ai envie de toi. Je crois que je vais choquer la famille et rester enfermé avec toi la première semaine de notre mariage. Les domestiques n’auront qu’à nous poser la nourriture devant la porte.

Elvira ne put s’empêcher de glousser, le nez enfoui dans le tissu de la veste de Nathan.

- Si tu fais cela, jamais plus je n’oserai sortir de ma chambre. Je serai beaucoup trop gênée, surtout vis-à-vis de ta mère.

Il n’eut pas le temps de répondre que déjà des pas approchaient, et ils durent se séparer.

- Avez-vous trouvé les oranges, Milord ?

- Oui, je les ai trouvées, répondit Nathan d’un air complètement frustré.

Elvira continua à rire doucement. Elle comprenait ce que Nathan ressentait, elle éprouvait la même chose. Cependant ils réussirent encore à se voler baisers et caresses avant de retrouver Agatha. Cette dernière portait à présent un chapeau décoré de houx. En la voyant Nathan ne put s’empêcher d’éclater de rire.

- Quoi ! demanda-t-elle, pourquoi ris-tu ?

- Tu as un goût déplorable en matière de chapeaux.

- Tu n’as aucune idée de la mode, lui rétorqua sa sœur un brin vexée.

Tandis qu'il continuait à se moquer du chapeau d’Agatha, Elvira se tourna vers elle et lui dit :

- Je trouve qu’il est euh... original. Voilà. Je suis sûre qu’aucune autre jeune fille ne porte un tel couvre chef.

- Et pour cause, ricana Nathan.

Elvira lui donna une petite tape sur le bras en lui faisant les gros yeux. Il se calma mais garda un large sourire sur le visage pendant tout le trajet. En arrivant en vue du château, Agatha dit à Elvira :

- Hum, est-ce que ça te gênerait d’affirmer que tu es restée avec moi tout le temps ? C’est euh... pour que maman ne pense pas que je suis un mauvais chaperon.

- C’est promis, je ne dirai rien.

Nathan fit un clin d’œil à sa sœur avant de lui jurer :

- Motus et bouche cousue.

Eglantine


Commentaires

krapokouk (le 22/12/2015)
le voleur de santons va t il faire acte de contrition et donner raison à Agatha?

Sacroliyu (le 22/12/2015)
Tu verras bien. Autrement où serait le charme ? lol

suzy972 (le 26/12/2015)
de plus en plus captivant

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