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On se reverra à Noël - Chapitre 19

Les Romantiques - 21/12/2015

Chapitre dix neuf

Qui veut la fin veut les moyens.

 

Après avoir ôté les bottes et donné un coup de manivelle à la lessiveuse du plum-pudding, on s’installa dans le salon. Elvira avait pris au passage, dans la bibliothèque, le livre de Charles Dickens « A Christmas Carroll ». Elle s’assit dans le fauteuil, à côté de la cheminée, et les enfants se regroupèrent autour d’elle pour l'écouter. Bientôt tous furent accrochés à ses lèvres, et à l’histoire d’Ebenezer Scrooge.

- Marley était mort, pour commencer ! Là-dessus, pas l'ombre d'un doute. Le registre mortuaire était signé par le ministre, le clerc, l'entrepreneur des pompes funèbres et celui qui avait mené le deuil. Scrooge l'avait signé et le nom de Scrooge était bon à la Bourse, quel que fût le papier sur lequel il lui plût d'apposer sa signature. Le vieux Marley était aussi mort qu'un clou de porte...

Nathan était allé rejoindre les hommes dans la salle de billard. Les dames étaient en train d’organiser la fête des métayers, et Agatha profita de ce moment où tout le monde était occupé pour se glisser dehors sans que personne ne l’aperçoive. Elle avait une idée en tête, et voulait vérifier si elle avait vu juste. Fini de faire des projets, il était temps de se jeter dans l’action. En arrivant à l’écurie, elle demanda à Bentley, leur cocher, s'il pouvait lui préparer un attelage afin d’aller en ville. Le vieux domestique, bien qu'étonné que la jeune fille veuille partir toute seule, répondit :

- Il n’a plus neigé cette nuit, Lady Agatha. La route a été dégagée par les différents véhicules qui ont circulé. Je peux sortir le landau, il faudra relever la capote. Il est assez léger, mais je ne sais pas ce que ça donnera s'il recommence à neiger avant notre retour.

- Et le traîneau ?

- Vous savez bien que Milord est le seul à conduire cet attelage.

- Bon, va pour le landau. Je vous attends dans la cour.

Elle repartit en pensant à ce qu’elle voulait faire, mais aussi à Elvira, lorsque cette dernière se rendrait compte qu’elle avait disparu. Elle se dirigea vers la cuisine et dit à la servante en train d’éplucher les pommes de terre :

- Mena, si jamais on me cherche veuillez dire que j’ai à faire en ville. Je serai de retour dans une heure ou deux, ça dépendra du temps.

La servante n’eut pas le temps d’acquiescer que déjà la jeune fille était sortie. Elle se demanda un moment s’il fallait tout de suite en parler, ou si elle avait le temps de finir son épluchage. Elle se décida pour la deuxième solution car la cuisinière était sévère. Si elle n’avait pas fini le travail dans les temps, elle allait encore se faire attraper.

Pendant ce temps Elvira, dans le salon, continuait son récit :

- Le spectre poussa encore un cri, secoua sa chaîne et tordit ses mains fantastiques. "Vous êtes enchaîné ? dit Scrooge tremblant ; dites-moi pourquoi.

- Je porte la chaîne que j'ai forgée pendant ma vie, répondit le fantôme. C'est moi qui l'ai faite, anneau par anneau, mètre par mètre ; c'est moi qui l'ai suspendue autour de mon corps, librement et de ma propre volonté, comme je la porterai toujours de mon plein gré. Est-ce que le modèle vous en paraît étrange ?".

Les enfants poussèrent de petits cris. Un fantôme enchaîné, cela leur plaisait beaucoup. Elvira leva la tête, s’aperçut qu’Agatha n'était plus là mais pensa qu’elle était allée rejoindre les autres femmes dans la salle à manger pour aider à la préparation des festivités. Elle continua donc son histoire en essayant d’imiter la peur de Scrooge.

- Scrooge tremblait de plus en plus. "Ou bien, voudriez-vous savoir, poursuivit le spectre, le poids et la longueur du câble énorme que vous traînez vous-même ? Il était exactement aussi long et aussi pesant que cette chaîne que vous voyez, il y a aujourd'hui, sept veilles de Noël. Vous y avez travaillé depuis. C'est une bonne chaîne à présent !”

Agatha monta dans l’attelage que Bentley venait d'avancer dans la cour. La neige qui recouvrait les pavés empêcha que l’on entende le bruit des roues. La jeune fille s’enroula frileusement dans son écharpe et mit ses mains dans son manchon. Pendant le trajet, elle se prit à réfléchir sur ce qu’elle allait dire.

Le petit bourg était tranquille. Peu de gens circulaient dehors, il faisait trop froid et on préférait rester à l’intérieur si on n’avait pas besoin de sortir. Quelques enfants s’amusaient à faire des glissades. Agatha se dirigea vers un magasin. Au-dessus de la porte était accrochée une enseigne un peu rouillée, en forme de botte.

Pendant ce temps, au château, Elvira continuait son histoire.

- A son grand étonnement, la lourde cloche alla de six à sept, puis de sept à huit et, ainsi régulièrement jusqu'à douze ; alors elle s'arrêta. Minuit ! Il était deux heures passées quand il s'était couché. L'horloge allait donc mal ? Un glaçon devait s'être introduit dans les rouages. Minuit ! Scrooge toucha le ressort de sa montre à répétition pour corriger l'erreur de cette horloge qui allait tout de travers. Le petit pouls rapide de la montre battit douze fois et s'arrêta. “Comment ! Il n'est pas possible, dit Scrooge, que j'ai dormi tout un jour et une partie d'une seconde nuit ! Il n'est pas possible qu'il soit arrivé quelque chose au soleil et qu'il soit minuit à midi !".

Elvira, par réflexe, leva les yeux sur l’horloge qui était posée sur la cheminée. Voyant qu’il était déjà tard, elle ferma le livre.

- Oh non ! dit Louise, il faut que tu finisses l’histoire.

- Nous allons bientôt manger. Je vous en raconterai un bout cet après-midi, un autre avant que vous alliez vous coucher et demain, pendant la journée, le reste.

Les enfants se levèrent, un peu déçus car cela commençait à devenir intéressant. Elvira les laissa à leur gouvernante, qui allait leur servir une collation dans la nursery. De son côté elle se dirigea vers la salle à manger. On n’allait pas tarder à passer à table, les dames avaient mis de côté les jolis petits paquets emballés pour les enfants des paysans.

- Agatha n’est pas ici ? demanda Elvira.

- Non, répondit la comtesse, je pensais qu’elle était avec toi et les enfants !

- Elle a disparu tandis que je lisais une histoire.

C’est à ce moment-là qu’une femme de chambre, venue pour servir le repas, leur dit :

- Madame la comtesse, Mena a dit que Mademoiselle Agatha était passée par la cuisine et l’avait chargée de vous apprendre qu’elle partait en ville et qu'elle serait de retour dans une ou deux heures.

- Et à quelle heure est-elle partie ? demanda la comtesse.

- Il y a une heure. Elle ne devrait pas tarder. Bentley est avec elle, Milady, il a attelé le landau.

Les messieurs entrèrent dans la pièce et une discussion s'ensuivit à propos de la fugitive.

- Mais qu’est-ce qui lui a pris bon sang ? dit Nathan.

Elvira soupira et regarda son assiette.

- Elle m’a parlé d’un roman qu’elle avait lu, où un détective privé a une façon d’enquêter assez originale. Elle m’a assuré que c’était une façon intellectuelle de découvrir le coupable d’un délit. Elle a ajouté qu’on pourrait utiliser cette méthode afin de retrouver notre voleur de santons.

- Quoi !! s’exclama la comtesse, elle veut confondre un voleur ?

Elvira se tordait les mains et commençait vraiment à s’inquiéter.

- Elle fait tellement de projets. Je l’ai bien sûr mise en garde, puis je me suis dit que ce n’était sûrement qu’une idée en l’air et je n’y ai plus pensé. Mais à présent…

- Gardons notre calme, dit Nathan.

Il prit la main d’Elvira pour la rasséréner et lui demanda :

- De quel livre s’agit-il ? Et qu’a-t-elle dit à propos de notre voleur ?

Elvira regarda son amoureux dans les yeux. Elle avait envie de se fondre dans ses bras. Elle lui répondit d’une voix incertaine :

- Le livre, c’est celui qu’elle a acheté en ville lorsque nous y sommes allées, il y a quelques jours. Je crois que l’auteur s’appelle Arthur Doyle. Elle ne m’a pas précisé ce qu’elle comptait faire, juste qu’elle avait des soupçons sur quelqu’un depuis qu’elle avait réfléchi.

A ce même instant, par la fenêtre de la pièce, on put voir au loin une forme noire qui se déplaçait vers le château.

- Je pense que le landau arrive, dit la baronne.

On se précipita dehors. En effet, le frêle attelage s’arrêta dans la cour. Une Agatha un peu frigorifiée en descendit.

- Qu’est-ce que ça veut dire ? demanda la comtesse, d’où viens- tu ? Et quelles sont ces manières de partir comme cela, ce n’est pas digne d’une Lady.

- Je m’excuse maman, j’aurais été là plus tôt s'il n'y avait pas eu, en cours de route, un petit accrochage entre deux autres véhicules.

- Pourquoi es-tu partie comme ça, en catimini ?

- C’est une longue histoire. Je préfèrerais vous la raconter à l’intérieur.

Eglantine


Commentaires

krapokouk (le 21/12/2015)
voilà, voilà!

brig (le 21/12/2015)
si cela continue, Elvira et Nathan ne vont jamais pouvoir annoncer leur mariage!

suzy972 (le 26/12/2015)
yessss

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