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On se reverra à Noël - Chapitre 10

Les Romantiques - 12/12/2015

Chapitre dix

Le bonheur est là où on le place.

 

Pamela ne resta pas trop longtemps, d’une part parce que la nuit tombait, d’autre part parce qu’on attendait des chutes de neige importantes. Nathan l’accompagna à la voiture et elle lui fit comprendre, par ses poses et ses minauderies, mais surtout par un baiser d’adieu, qu’elle était prête à revoir leurs futures relations.

«Mais c’est trop tard», se dit Nathan. Il se mit à rire tout seul dans la nuit en regardant s’éloigner le carrosse. «Je devrais écrire une lettre de remerciements à Hubert Cunningham pour avoir eu l’excellente idée d’inviter Pamela, cela m’a empêché de faire la plus grande erreur de ma vie».

Et il resta là, dans le noir, à se souvenir du baiser passionné qu’il avait partagé avec Elvira. Au départ il avait juste voulu la taquiner un peu, mais après qu’elle l’eut embrassé sous le gui, il pensait bien qu’il ne lui était pas indifférent. Cependant il ne s’attendait nullement à cette passion. Il se frotta les mains. Le froid commençait à s’insinuer dans ses vêtements et il se dépêcha de rentrer.

Toute la famille s’était rassemblée dans la salle à manger et la table était couverte de papiers. Même les enfants étaient assis, et les adultes plaisantaient.

- Que faites-vous de si intéressant ? demanda-t-il en entrant dans la pièce.

- Nous nous sommes décidés à faire des cartes de Noël. Certaines seront conventionnelles, les autres fabriquées par les enfants, lui répondit sa mère.

Ces derniers n’étaient pas peu fiers de pouvoir montrer leur savoir-faire aux adultes.

- Voyez-vous ça, répondit-il en souriant, et à qui allez-vous envoyer vos vœux ?

Chacun avait une liste de noms. On choisit les cartes. Pour tante Adèle, un paysage hivernal qui lui ressemblait, fit remarquer Agatha en riant ; un bouquet de gui et de houx pour le cousin Albert qui piquait pareillement quand on l’embrassait, fit remarquer Louise ; des bougies allumées pour la famille de tante Hortense, pour leur réchauffer le cœur après la longue maladie de cette dernière, dit la baronne ; une crèche avec l’enfant Jésus pour les Fergusson, qui avaient eu la joie d’accueillir un nouveau membre récemment, dit Eugenia en se caressant le ventre.

- Et toi, quelle est ta liste ? demanda ingénument Elvira en souriant.

Nathan soupira et répondit :

- A part quelques vieux amis de Cambridge, j’ai ici toutes les personnes qui me tiennent à cœur.

Il fixa intensément Elvira en disant ces derniers mots.

La baronne et la comtesse se regardèrent d’un air entendu. En fin de compte, elles avaient eu raison de concocter ces fêtes ensemble.

Il y eut, cette nuit-là, une tempête de neige. Le vent hurlait, le paysage blanchissait de plus en plus et le gel dessinait sur les vitres des mosaïques de formes diverses.

Lorsque la maisonnée se réveilla sous ce manteau blanc, la gouvernante ne put, cette fois, retenir les enfants qui sortirent dans leurs vêtements de nuit. Le paysage semblait figé. Même les arbres qui, hier encore, étaient gris, avaient mis leurs habits blancs. Le froid, plus que les remontrances de leur nourrice, fit rentrer les petits diables. Aujourd’hui était un grand jour. Celui où entrerait dans la maison le roi de la fête : «Le sapin».

- Pourvu que les bûcherons puissent venir nous l’apporter, s’inquiéta Jeffrey.

- Tranquillise-toi, ils ont des traîneaux, lui répondit le comte, car vois-tu, le plus gros de leur travail, c’est-à-dire l’abattage, se fait en hiver, lorsque les arbres n’ont plus de sève. Il est vrai que nous n’avons pas tellement souvent une neige aussi épaisse, mais ce sont des hommes de terrain. Ils m’ont promis de l’amener aujourd’hui, donc je ne me fais pas trop de soucis.

Ces paroles semblèrent calmer les enfants, qui se mirent à faire des tas de projets pour le jour même.

- Mes chers petits, dit la comtesse, comme le sapin n’est pas attendu avant cet après midi, nous allons, ce matin, prendre le traîneau et rendre visite à des enfants qui n’ont pas votre chance. Nous irons à l’orphelinat apporter des douceurs à ces petits qui n’ont plus de famille.

On attela les chevaux devant le traîneau et les enfants, le comte, sa mère, Agatha et Elvira se serrèrent à l’intérieur. Les plus jeunes sur les genoux des adultes.

- On aura plus chaud ainsi, remarqua Agatha.

Elvira sentait bien la chaleur de la cuisse de Nathan, et le regard qu’il lui lançait.

L'équipage partit au trot. La comtesse commença à chanter. Les autres l’imitèrent avec plaisir. L'air s’emplit de musique et, partout où ils passaient, se propageait un peu de la joie qu’ils avaient à être ensemble.

Dashing through the snow, in a one-horse open sleigh,
over the fields we go, laughing all the way (ha-ha-ha)
Bells on bob-tail ring, making spirits bright!
Oh, what fun it is to ride and sing a sleighing song tonight.

Oh! Jingle bells, jingle bells, jingle all the way!
Oh, what fun it is to ride, in a one-horse open sleigh-ay

C'est dans cette bonne humeur qu’ils arrivèrent au manoir qui avait été converti en orphelinat.

La directrice, Mme Parsons, une veuve accorte qui adorait les enfants, les accueillit avec plaisir dès qu’ils descendirent de leur équipage. Nathan resta sur le traîneau et repartit tout de suite, car il devait aller chercher les cadeaux pour les enfants.

Ceux-ci attendaient avec impatience les visiteurs. Ils avaient entre six mois et douze ans, et étaient une vingtaine. Les plus grands récitèrent un poème qui fit monter les larmes aux yeux de la comtesse. On lui montra tous les travaux qui avaient été faits depuis la dernière fois qu’elle était venue. Elvira resta dans la chambre des bébés. Elle put même donner le biberon à la plus jeune pensionnaire, une petite fille du nom d’Amélie. Elle avait été abandonnée devant le perron, dans une vieille couverture, alors qu’elle avait encore le cordon ombilical.

- La plus grande difficulté, expliqua la femme qui s’occupait des tout petits, c’est que les nourrissons ne supportent pas toujours le lait de vache. Hélas, nous ne pouvons pas nous offrir une nourrice à domicile, malgré la grande générosité de Madame la comtesse.

Elvira regarda la petite fille, qui semblait tout étonnée d’être dans ses bras. L'enfant lui tira les cheveux et la jeune fille se sentit fondre. Elle avait, tout à coup, envie d’avoir un bébé comme celui-là et, si elle avait pu, elle l’aurait adopté sur le champ.

- Si tu t’y prends bien, lui fit remarquer Agatha, tu pourrais en avoir un au prochain Noël.

Il y eut des rafraîchissements, et les femmes commencèrent à se poser des questions sur le retard de Nathan.

Lorsqu’il arriva, il était accompagné de Gulliver qui avait suivi le traîneau tout au long du chemin. Ses cheveux étaient en broussaille, un morceau de sa manche arraché, il lui manquait un bouton et un bleu commençait à paraître sur sa joue.

- Ce n’est rien, répondit-il aux questions inquiètes que lui posèrent les femmes, j’ai glissé dans la neige et me suis étalé de tout mon long. Le chien, lui, ne voulait pas rester au château et m’a suivi. Son maître devait lui manquer.

Jeffrey présenta alors son chien aux enfants, qui étaient tous heureux de caresser l’animal.

Louise était dans son élément, elle avait enfin l’occasion de jouer avec des filles de son âge. L’une d’elles lui fit remarquer que Louise était un drôle de nom.

- Je m’appelle comme ça parce que mes parents m’ont rapportée de France, expliqua-t-elle doctement, ils y avaient fait un grand voyage. Je suis le souvenir qu’ils ont ramené.

On distribua des friandises, mais les cadeaux furent enfermés dans une armoire en attendant le jour de Noël.

Nathan s’amusait avec les garnements. Cependant, Elvira sentait confusément qu’il cachait quelque chose. Quelque chose qui lui était arrivé et dont il ne voulait pas leur parler. Elle repensa à ce que le juge avait dit à propos de ce Bertram et pâlit. Elle resta silencieuse, de telle sorte que la comtesse lui demanda si elle se sentait bien.

Eglantine

 


Commentaires

krapokouk (le 12/12/2015)
tout un monde est recréé.

suzy972 (le 23/12/2015)
ohhh quel régal

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