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Devine qui vient dîner...

Les Romantiques - 11/12/2019

Film - mythique s’il en est -, de Stanley Kramer sorti en 1967, il a à son époque bousculé les consciences et propulsé Sidney Poitier à l’avant de la scène. Il a également à son affiche deux monstres sacrés, Spencer Tracy et Katharine Hepburn ainsi, entre autres, que Katharine Houghton (la nièce de Katharine Hepburn).

Tourné à San Francisco, couronné de succès, avec dix-neuf nominations, il obtient en 1968 :
• l’Oscar de la meilleure actrice pour Katharine Hepburn, celui du meilleur scénario original pour William Rose et, la même année
• le prix David di Donatello du meilleur film étranger pour Stanley Kramer, du meilleur acteur pour Spencer Tracy et de la meilleure actrice pour Katharine Hepburn puis en 1969
• le BAFTA de la meilleure actrice pour Katharine Hepburn et du meilleur acteur à titre posthume, pour Spencer Tracy et
• le BAFTA : Prix UN pour Stanley Kramer.

Catalogué dans les comédies romantiques il était, avant l’heure, le film d’amour réunissant un couple avec une couleur de peau et un héritage socio-culturel différents. Si la fin est heureuse dans le film, il n’en a pas été de même dans la réalité puisque Spencer Tracy est décédé peu après la fin du tournage.

Note de Fabiola : Un remake réalisé par Kevin Rodney Sullivan et intitulé Black/White est sorti au cinéma en 2005, avec la trame inverse : le héros blanc (Ashton Kutcher) rencontre la famille noire de sa petite-amie (Zoe Saldaña). Même si l’histoire est assez sympathique dans l’ensemble, le mauvais jeu d’acteur d’Ashton Kutcher gâche beaucoup le film.

Synopsis :
Au milieu des années 1960 aux Etats-Unis, Joey Drayton, une jeune femme de vingt-trois ans, vient à San Francisco présenter son futur époux, le docteur John Prentice, à ses parents. Sous-directeur de l’Organisation mondiale de la santé, brillant médecin et professeur de médecine de trente-sept ans, John Prentice est veuf depuis que sa première  épouse et son fils sont décédés dans un accident, huit ans auparavant.

John craint pourtant la réaction des parents de Joey, car il est noir et elle blanche, différence particulièrement problématique à l’époque où, explique le père de Joey, une  telle union « serait illégale dans plusieurs États ». Les parents de Joey ont des convictions libérales très affirmées et ont élevé leur fille dans le refus du racisme. Ils n’en éprouvent pas moins une surprise mêlée d’embarras à la vue du fiancé, et la mère se demande s’ils n’auraient pas dû préciser à leur  fille : « Garde toi bien dans ta vie d’épouser un Nègre. » La situation se complique lorsque, s’apercevant de leur réticence, John fait savoir au père qu’il renoncera au mariage s’il n’obtient pas son consentement sans réserve. Matt et Christina Drayton se retrouvent face à leurs contradictions. Leur fille projette de se marier avec John à Genève deux semaines plus tard.

La soirée, déjà tendue, le devient encore plus lorsque Joey décide d’avancer la date de son départ pour la Suisse et invite à dîner les parents de John, qui habitent à Los Angeles. Eux aussi sont très perturbés par cette situation inattendue. Le père Ryan, un prêtre catholique ami de la famille, et Tillie, la bonne noire, n’hésitent pas à donner leur opinion sur la question.

Mon avis :
Alors, que dire de ce film ? Je l’ai vu un peu par hasard, et je ne savais trop C’est avant tout une belle histoire d’amour avec un Sidney Poitier très séduisant, élégant et reflétant, si on oublie le contexte, le prince charmant idéal pour ce genre de comédie romantique.

Quand j’ai conversé par mail avec Fabiola suite au dossier sur la diversité ethnique dans la romance, je ne lui ai pas parlé littérature (je n’en ai jamais lu dans le genre) mais cinéma à propos du film « Devine qui vient dîner » qui apparaissait en fond d’image du questionnaire qu’elle nous avait envoyé, lui disant « …Par contre, j’ai toujours adoré le film « Devine qui vient dîner » avec Sidney Poitier. Peut-être aussi parce que si j’aime bien Sidney Poitier, j’adore Katharine Hepburn et Spencer Tracy… ». Suite à cela, Fabiola m’a proposé d’en faire un article pour le webzine.

Même si je m’en rappelais très bien, l’ayant regardé tant de fois (en VHS A), je décidai, avant de vous en parler, de le revoir. Et de plus j’en avais très envie. A Alors, dans la foulée, je suis allée sur le site de la Fnac pour me le racheter en DVD. Et là je suis tombée sur une critique faite par les experts Fnac, qui m’a interpelée et disait, je cite : « On peut légitimement reprocher à cette fable moraliste de Stanley Kramer d’être édulcorée, idyllique et peu plausible. Interprétée par le très séduisant Sidney Poitier, le promis est un homme noir qui semble n’avoir que des qualités. Il est intégré (trop aux yeux du jeune public noir), cultivé et jouit d’une belle situation. Néanmoins, cette comédie romanesque pétillante soulève le problème des mariages mixtes, qui reste toujours d’actualité… »

Alors, s’il est vrai que j’ai adoré ce film, une chose m’a toujours gênée en le regardant. Mais contrairement à ce que dit cette personne, ce n’est pas parce qu’il est édulcoré, idyllique et peu plausible car, après tout, c’est souvent le cas dans la romance, autant en 1967 que maintenant – plus encore en 1967 car, de nos jours, elle reflète malgré tout beaucoup plus la réalité – ni par le qualificatif de fable que je trouve péjoratif dans cette critique ou par le fait qu’il soit, soi-disant, moraliste parce que je ne vois pas en quoi ce film véhicule une morale ou ce qui pourrait choquer la morale car je pense que cet expert se référait à une des définitions de la morale qui est : « ensemble de règles de conduite considérées comme bonnes ».

Alors oui, beaucoup de gens ont pu « peut-être » être choqués, mais ce n’était pas leur sens des règles de bonne conduite qui était mis à mal à mon avis, mais tout simplement leur intolérance. Et Stanley Kramer a su très bien le démontrer par des répliques assez percutantes de Tillie, la femme de ménage de couleur qui « …a horreur de voir un membre de sa race se prendre pour ce qu’il n’est pas… » et l’associée de la mère qui, elle, trouve que ça ne ressemble pas à sa fille d’agir d’une façon aussi folle et lui demande ce qu’elle pourrait faire pour empêcher « ça » !

Il n’y a rien dans cette histoire d’amour qui mette en cause la morale, mais bien le racisme et l’intolérance, ce qui est certainement l’un des buts recherchés : montrer l’intolérance et le racisme qui sévissaient dans l’Amérique des années 60, mais également refléter le souci que ça générait chez des parents pour leurs enfants, pour leur bonheur, dans un pays où les mariages mixtes étaient encore interdits dans beaucoup d’états et où, dans certains même, ils pouvaient les conduire en prison ; porter l’espoir que les temps étaient en train de changer et, surtout, offrir aux spectateurs une très jolie comédie romantique.

Mais intolérance et racisme étaient des deux côtés. Pour preuve la réflexion de Tillie, qui semble en être restée à l’époque où les noirs étaient esclaves des blancs et s’insurge qu’un homme de couleur puisse s’élever au-dessus de sa condition.

Quant au côté peu plausible, c’est vrai que le personnage qu’interprète Sidney Poitier a tout pour lui. Il est beau, intelligent, bardé de diplômes avec un statut professionnel de renommée internationale (cf. infos) et donc à l’aise financièrement. Mais pourquoi nous plaindrions-nous de regarder une magnifique histoire d’amour avec un héros du genre si cher à Harlequin, dont nous apprécions les romances depuis des années !?

Non, ce qui m’avait souvent gênée en regardant ce film, c’est que par moments les acteurs donnent l’impression d’en faire trop, de surjouer. Comme s’ils voulaient absolument convaincre les spectateurs de la justesse du thème du film qu’ils interprètent. Je ne serais pas allée jusqu’à dire qu’ils essayaient également de s’en convaincre eux-mêmes. Mais, en y réfléchissant, c’est peut-être tout simplement dû à la tension qui régnait sur le plateau en raison de l’état de santé de Spencer Tracy, très malade au moment du tournage. Malgré tout, j’ai souvenir qu’à l’époque le seul acteur que le film avait mis mal à l’aise était Sidney Poitier.

Je n’ai rien retrouvé à ce sujet sur internet, par contre, j’ai découvert deux anecdotes sur un site et je vous les livre telles quelles :
« Un film audacieux pour l’époque
Enorme succès au box-office, aidé par dix nominations aux Oscars, la suggestion d’un couple mixte était à l’époque une proposition fort audacieuse. En effet, en 1967, seize Etats du Sud interdisaient encore l’union mixte. Le Ku Klux Klan organisa des manifestations devant les salles qui osaient programmer le film. En fait, le cinéma hollywoodien était hanté par la peur du métissage. »

« L’ambiguïté de Sidney Poitier
Sidney Poitier est un exemple de réussite unique parmi les acteurs noirs. Son image de héros noble dans des films peuplés de gens de race blanche a fini par devenir le symbole de la lutte menée par les noirs pour l’obtention de l’égalité sociale pendant les années 1950 et 1960. Il sera le premier noir à obtenir l’Oscar du meilleur acteur en 1968 avec Le lys des champs de Ralph Nelson. Mais il pose un problème car il occupe une place ambiguë. D’un côté, il offre aux noirs une image enfin digne à laquelle ils peuvent s’identifier, mais il est aussi accusé par d’autres noirs de n’être qu’un faire-valoir des Blancs. »

…Et tant et tant que tournera la ronde des nuits et des jours
L’amour, l’amour nous conduira et rien n’y changera…

Et c’est vrai. Car comme disait au début du film Joey à Tillie, leur femme de ménage qu’elle adore : « …toi, je t’aime depuis toujours. Tu as la peau aussi noire que la sienne. Alors comment serait-il possible que j’aie raison de t’aimer et que j’aurais tort de l’aimer lui ?... »

Bien qu’il en soit question tout du long, je n’ai jamais regardé ce film comme, essentiellement, une histoire d’amour interraciale, mais comme une histoire d’amour tout court. Peut-être justement parce qu’il véhicule tous les codes de la romance, avec un héros peut-être un peu trop beau, peut-être un peu trop riche, peut-être un peu trop TOUT, et si jeune pour la situation professionnelle qu’il occupe, et une héroïne sachant ce qu’elle veut malgré, elle aussi, son jeune âge, et que les obstacles de la vie n’effraient pas. Parce qu’il faut dire que Stanley Kramer n’a pas fait dans la dentelle. Tout est là pour faire chavirer dans les chaumières. Mais, après tout, il ne faut jamais bouder son plaisir.

Alors, après avoir attendu huit jours que le DVD m’arrive, parce que, paraît-il, il fallait tout ce temps A plus trois jours supplémentaires parce qu’il n’avait pas été livré à la bonne adresse (!!!), j’ai ENFIN pu le revoir. Et mon plaisir est toujours le même. Si un mariage mixte n’a plus rien d’étonnant de nos jours, c’est toujours une aussi belle comédie romantique, jouée par des acteurs magnifiques. C’est vraiment un film à voir ou à revoir.

Infos : Dans les dialogues, à un moment donné, il est fait référence à Martin Luther King, dialogues qui furent supprimés alors que le film était toujours dans les salles, Martin Luther King venant d’être assassiné.

Quand le film passa à la télévision française en 1977, au cours des « Dossiers de l’écran » qui suivirent, il fut remarqué que la situation du personnage qu’interprétait Sidney Poitier était exceptionnelle pour l’époque dans la société américaine, car pratiquement aucun noir américain n’était parvenu en 1967 à un statut professionnel de ce niveau.

 

Notes 1 – les mariages interraciaux aux Etats-Unis représentaient, l’année de la sortie du film, seulement 3 % des mariages.
2 – mais qui changea le 12 juin 1967, la Cour suprême des États-Unis proclamant – dans le cadre de l’arrêt Loving v. Virginia – anticonstitutionnelles toutes lois interdisant les mariages interraciaux.
3 – paroles tirées de la chanson française du générique.

 

Sources :
Google images
https://fr.wikipedia.org/wiki/Devine_qui_vient_dîner...

https://www.fnac.com/a1271135/Devine-qui-vient-diner-Spencer-Tracy-DVD-Zone-2#int=S:Suggestion|FA:DVD|3|1271135|BL1|L1

http://www.allocine.fr/film/fichefilm-12693/secrets-tournage/


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