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Marie Marvingt - Héroïne Historique

Les Romantiques - 10/11/2019

Surnommée « La fiancée du danger », Marie Marvingt pratiqua entre autres sports l’alpinisme, le ski, la course, le cyclisme, et fut aussi journaliste, infirmière et pionnière de l’aviation. Véritable cassecou et touche-à-tout, son palmarès important ferait presque douter de ses exploits sans les nombreux témoignages, articles et photographies d’époque qui en apportent la preuve.

Née à Aurillac le 20 février 1875, Marie Félicie Élisabeth Marvingt grandit en Lorraine. De ses quatre frères et soeurs, un seul survécut jusqu’à l’âge de dix-neuf ans, et leur mère mourut lorsque Marie en avait quatorze. Félix, son père, postier, était passionné par le sport et transmit sa passion à sa fille : à cinq ans, Marie était déjà capable de nager quatre kilomètres ! A quinze, elle participa à une course de 400 kilomètres en canoé entre Nancy et Coblence en Allemagne. Poussée par son père elle pratiquait entre autres le cyclisme, le ski, le patinage, l’escrime et la gymnastique, et elle suivit également une formation au cirque de Rancy pour apprendre la voltige, le jonglage et le funambulisme.

En 1899 elle fut l’une des premières femmes à obtenir le certificat de capacité pour conduire des automobiles, ancêtre du permis de conduire, et en 1905 elle fut la première femme à traverser Paris à la nage. Elle prit aussi part à des compétitions de tir.

En 1904 elle participa à une première course cycliste entre Nancy et Bordeaux, puis à un Nancy-Milan en 1905 et un Nancy-Toulouse en 1906. A une époque où les femmes n’avaient pas le droit de porter un pantalon, Marie inventa la jupe-culotte afin de ne pas être encombrée par les jupes pour pédaler. En 1908, elle tenta de participer au Tour de France cycliste mais sa candidature fut rejetée car la course était exclusivement masculine. Elle suivit néanmoins le même parcours en prenant le départ peu après les hommes et termina le Tour, contrairement aux deux tiers des concurrents, mais aucun document n’officialise sa participation.

Egalement alpiniste confirmée, elle escalada de nombreux sommets des Alpes, ce qui lui valut d’être citée comme l’une des pionnières de l’alpinisme français par le magazine Femina en septembre 1911. Entre 1908 et 1910, elle reçut plus de vingt médailles d’or à Chamonix dans différentes disciplines : en ski, patinage artistique et patinage de vitesse, au concours de sauts ou encore en gymkhana sur glace. Le 26 janvier 1910, elle remporta la première compétition féminine de bobsleigh à Chamonix, au cours de la Coupe Léon Auscherp.

En mars 1910, l’Académie des Sports lui décerna à l’unanimité la grande médaille d’or, et certains membres  évoquèrent l’idée de la faire entrer parmi eux. C’est la seule et unique fois où l’Académie donna un prix « toutes disciplines ».

Accro à l’adrénaline, Marie passa son brevet de pilote de ballon en 1909, et fut la première femme à traverser par ce moyen la mer du Nord et la Manche, ralliant Nancy à l’Angleterre le 26 octobre 1909, soit un vol de quatorze heures. En 1910 elle passa le brevet de pilote d’avion, devenant la troisième femme de l’histoire à l’obtenir. Elle établit de nombreux records, notamment en durée de vol et en nombre d’heures de vol sans accident - 717 vols sans la moindre casse de mai à décembre 1912, exceptionnel vu les avions de l’époque. Le 12 décembre 1913, prise dans le brouillard, elle fut forcée d’atterrir dans un champ et son avion se renversa sur elle. Elle fut dégagée après trente-cinq minutes par des cultivateurs des environs et s’en sortit sans aucune fracture mais avec le visage lacéré, blessures dont elle garda des cicatrices. Marie écrivit dans une lettre à un ami journaliste un mois après l’accident : « Une fois de plus je reste la fiancée du danger, mais le mariage n’a pas été loin... [...] Mon casque était complètement enfoncé dans la terre, mon visage baignait dans le sang. Écrasée sous la masse de mon appareil, je respirais difficilement. Heureusement qu’avec ma main gauche, je pus creuser la terre près de ma bouche pour me permettre d’aspirer un peu d’air. »

Très remarquée pour ses exploits allant à l’encontre des comportements féminins habituels, elle devint la coqueluche de la presse qui la surnomma « Marie casse-cou » ou encore « la reine de l’air ». En décembre 1910 la Revue Aérienne lui consacra un article où le journaliste énumérait ses exploits après avoir déclaré : « Il n’y a sûrement pas une femme au monde qui possède un bagage sportif aussi universel que celui que possède Melle Marvingt. Et je ne voudrais pas garantir qu’il existe un seul représentant du sexe mâle qui en ait un semblable ». Et il poursuivait en disant : « Ce qu’il ne faut pas oublier de dire, c’est qu’à résultats sportifs égaux atteints, une femme a dix fois plus de mérite qu’un homme, non seulement par suite de sa force physique indéniablement moins grande, mais parce qu’il lui faut, pour pouvoir s’y livrer d’abord, et y réussir ensuite, vaincre une foule de préjugés, d’obstacles et d’impedimenta de toute sorte qu’un homme, dans le même cas, ne trouvera jamais sur sa route. » L’article se termine sur le souhait du journaliste que de nombreuses femmes suivent l’exemple de Marie Marvingt, qui l’avait visiblement beaucoup marqué.

En 1910, le fondateur de l’association des Dames françaises de la Croix-Rouge proposa un prix pour la fabrication d’un avion-ambulance. Marie Marvingt conçut un prototype avec l’ingénieur Louis Béchereau, mais le projet n’aboutit pas. En juin 1912, elle le soumit à la direction de l’aéronautique militaire et exposa les plans de son avion-ambulance au salon de l’aviation. Malgré une tournée de conférences pour promouvoir la création d’avions de secours et recueillir les fonds nécessaires, Marie ne put mener à bien ce projet avant le déclenchement de la Première Guerre mondiale.

Au début de la guerre, elle proposa ses services comme pilote mais ne reçut d’abord pas de réponse. Elle remplaça un pilote malade et participa à une mission de bombardement près de Metz pour laquelle elle reçut la Croix de Guerre en 1915, mais l’Armée finit par refuser de l’engager officiellement. En possession du diplôme d’infirmière de la Croix Rouge, elle travailla pendant deux ans auprès d’un chirurgien à Nancy, avant de décider de se faire passer pour un homme et d’aller combattre. Elle intégra donc le 42e bataillon de chasseurs à pied sous le nom de Beaulieu. Selon une première version, son cousin, colonel d’un autre régiment, ne la reconnut même pas. Selon la deuxième version, ce fut lui qui la démasqua après presque deux mois sur le front. Le maréchal Foch lui donna l’autorisation de travailler sur le front en tant qu’infirmière et correspondante, et elle put rejoindre un bataillon de chasseurs alpins en Italie où elle participa à des missions de rapatriement à ski de soldats blessés.

Après la fin de la guerre, Marie parcourut le monde pour donner des conférences sur l’importance de l’aviation sanitaire. Également diplômée en lettres, parlant cinq langues dont l’esperanto, elle travailla entre les deux guerres comme journaliste et correspondante de guerre avec les forces françaises en Afrique du Nord. Elle aida à créer un service sanitaire au Maroc et fut décorée de la médaille de la Paix du Maroc. Jamais à court d’idée, elle inventa les skis métalliques lors d’une tournée en Afrique saharienne, invention qui fut plus tard reprise par les forces françaises pour faire atterrir les avions sur la neige.

Elle écrivit et réalisa deux documentaires sur l’aviation sanitaire, Les Ailes qui sauvent et Sauvés par la Colombe. Le premier fut présenté pour la première fois à Paris en 1935 devant le ministre de l’Air Victor Denain. La même année, elle devint la première infirmière de l’air diplômée d’une formation créée en partie suite à ses travaux. Quelques mois plus tôt elle avait été faite Chevalier de la Légion d’honneur. A l’aube de la Seconde Guerre Mondiale, son idée d’Aviation Sanitaire était soutenue par les maréchaux Foch et Joffre.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, alors âgée de plus de soixante-cinq ans, Marie travailla comme infirmière de l’air avec le grade de caporal. Après l’armistice elle publia deux livres autobiographiques, La fiancée du danger et Ma traversée de la Mer du Nord en ballon, pour lesquels elle fut lauréate du concours de la société Women’s Aeronautical Association de Los Angeles en 1949. La même année elle fut nommée Officier de la Légion d’honneur. En 1955, le gouvernement américain lui offrit pour son anniversaire (quatre-vingts ans quand même !) un vol au-dessus de Nancy à bord d’un chasseur supersonique. Peu de temps après Marie passa son brevet de pilote sur un hélicoptère à réaction, et reçut le grand prix Deutsch de la Meurthe de la Fédération nationale d’aéronautique à la Sorbonne pour son oeuvre dans l’aviation sanitaire. A quatre-vingt-six ans elle parcourut Nancy-Paris à vélo, puis retourna à Nancy aux commandes d’un hélicoptère.

Détentrice de dix-sept records mondiaux et trente-quatre décorations dont la Légion d’honneur, Marie termina sa vie dans un hospice, et mourut dans un relatif anonymat le 14 décembre 1963 en banlieue de Nancy à l’âge de quatre-vingt-huit ans. Le Chicago Tribune, qui avait suivi nombre de ses exploits, lui rendit hommage en disant qu’elle était « la femme la plus extraordinaire depuis Jeanne d’Arc ». Mais malgré sa vie exceptionnelle, elle avait déjà été largement oubliée.

Selon Rosalie Maggio, écrivaine américaine qui lui a consacré plusieurs livres : « Elle était une femme. On ne notait pas vraiment leurs records. Elle a aussi vécu très longtemps. Si elle était morte en aéroplane quand elle était toujours belle et jeune, alors elle aurait été une légende. »

Mais Marie n’a pas été oubliée par tout le monde. Chaque année depuis 2003, l’Aerospace Medical Association remet le prix Marie Marvingt à une personnalité de la médecine aéronautique. De nombreux bâtiments en Lorraine portent son nom. Depuis le début des années 2000 on recommence lentement à parler d’elle, à travers des articles ou des expositions temporaires. Marie méritait bien sa place parmi nos héroïnes historiques, n’est-ce pas ?

 

Rinou

Sources
https://fr.wikipedia.org/wiki/Marie_Marvingt

https://histoireparlesfemmes.com/2016/02/22/marie-marvingt-la-fiancee-du-danger/

https://www.france24.com/fr/20141007-grande-guerre-marie-marvingt-fiancee-danger-aviation-pionniere-feminisme-record

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k6555005d/f6.image.r=marie%20marvingt.langFR

https://www.soframas.asso.fr/index.php/prix-marie-marvingt

 


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