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Le Romantic Suspense

Les Romantiques - 16/11/2018

L’une des tables-rondes du Festival du Roman Féminin 2018 portait sur le Romantic Suspense. Elle réunissait les trois auteurs Olivia Rigal, Scarlett Cole et Lisa Marie Rice. Olivia Rigal, qui était également chargée de l’animation - et de la traduction vu qu’elle vit en France depuis longtemps -, a préféré laisser le public poser des questions, plutôt que de suivre une trame précise.

   

 

Olivia Rigal : D’abord une petite présentation. J’écris du RS avec des bikers, et quelques RS sans bikers, qui ne sont pas traduits en français. Pour moi écrire de la romance toute seule pose un problème, car il y a quand même un nombre limité de quiproquos et de malentendus qui peuvent créer un obstacle entre un homme et une femme. S’ils se rencontrent, s’aiment, tout marche bien, ils se marient : d’abord il y en a pour cinq pages, et c’est un peu peu, sauf si vous écrivez une nouvelle. Mais il peut aussi y avoir une scène de sexe de cinq pages.

Scarlett Cole : J’écris du RS et de la romance contemporaine, et ma série principale de RS a pour héros des Navy SEALs.

Olivia : Les SEALs ce sont les forces d’intervention de la Marine américaine.

Scarlett : J’aime écrire du RS parce qu’on peut inclure tous les différents genres dans un livre : romance, thriller, mystère, danger et aventure, tout ça dans un seul livre.

Olivia : Comme ça il n’y a pas d’ennui pour nous quand on l’écrit, et on espère que ça ne vous ennuie pas non plus.

Scarlett : Et à cause de toutes ces émotions, les personnages peuvent faire l’amour pendant cinq pages Sourire

Lisa Marie Rice : Ou même dix Sourire Moi aussi j’écris du RS, j’ai des héros Navy SEALs, mais la plupart ne sont pas des commandos. Les forces spéciales ont
beaucoup de succès. Je crois que si un homme peut tuer pour toi, s’il peut se faire tuer pour toi, alors c’est un homme à garder et à épouser. Et moi j’écris des scènes de sexe de plutôt dix ou quinze pages Sourire Pour moi aussi, c’est le genre le plus vivant, parce qu’il y a de l’amour, de la passion, du danger. Souvent mes héroïnes sont courageuses aussi, et c’est plus excitant que la romance contemporaine.

Public : Vous pouvez nous donner les titres de vos livres ?

Olivia : Ma série s’appelle Les tornades d’acier. Je reviens sur l’importance des femmes. Mes héros sont respectueux des femmes. Je ne supporte pas la Dark Romance où, en gros, c’est le syndrome de Stockholm qui est glorifié. Par exemple un tueur à gages engagé par une famille pour violer et tuer une
nana, il la kidnappe, il la viole, et une fois qu’il l’a sautée il dit « Tiens je me la garderais bien sous le coude », donc il la garde et elle finit par tomber amoureuse de lui. Ça n’efface pas le fait qu’au départ il était là pour la tuer. Donc glorifier ce genre de relation, où la femme est un objet, c’est quelque chose que je me refuse à faire. Ce qui fait que mes bad boys ne sont pas totalement de vrais bad boys. Mais ça donne quand même du suspense, car il y a une intrigue.

Scarlett : Ma série s’appelle Love over duty (non traduite), ce sont des héros super, qui à un moment finissent par se faire botter les fesses par des femmes fantastiques. Elles les mettent au défi de décider ce qui est le plus important pour eux : leur devoir ou l’amour.

Lisa : Ma série la plus connue est L’homme de minuit, c’est une longue série où l’homme tombe toujours amoureux de la femme presque à la deuxième page. La chose la plus importante pour moi, c’est que le héros admire sa femme. Elle n’est pas musclée comme lui, mais elle est intelligente, parfois plus que lui. Et j’ai une nouvelle série qui sort en anglais, dans le premier il y a une attaque au Louvre, mais mon héros bloque l’attaque. C’est plus léger comme tonalité, la série Minuit est plus sombre.

Public : Comment est-ce que vous équilibrez le suspense par rapport à la romance ? Est-ce que parfois vous êtes obligées d’accentuer l’un par rapport à l’autre ?

Olivia : Pour moi, quand j’écris toute seule, je dois mettre à peu près 60% de romance et 40% de suspense. Tout dépend du public que vous voulez viser. J’ai écrit un livre avec une co-auteur qui s’appelle Shannon Macallan, qui est retraitée de la Navy. On a mis 50/50 et on a attiré un lectorat d’hommes. Si on veut un lectorat de femmes, il faut plus de romance et un peu moins de suspense. Mais les deux sont indivisibles, puisque c’est le suspense qui va soit les forcer à rester ensemble, soit les séparer, parce qu’elle c’est la fille du mafieux et lui c’est le policier, donc ça les sépare. Ou comme dans le film Africa Queen avec Humphrey Bogart et Katherine Hepburn, qui n’est pas du suspense : vous les mettez tous les deux dans un bateau et vous leur faites descendre la rivière. Eh bien dans le RS c’est un peu ça, de temps en temps vous en prenez deux, vous les collez ensemble, au départ ils n’ont rien en commun, mais c’est l’histoire, le suspense, qui va créer la romance.

Scarlett : J’essaie de faire en sorte que mes personnages soient les héros de mon intrigue de suspense, qu’ils ne soient pas juste des témoins, que le suspense s’articule autour d’eux. Et quand on fait ça, on peut avoir un couple qui reste souvent ensemble, l’intrigue les fait rester ensemble au lieu d’en faire partir un. Je pense que, quand les deux collaborent pour solutionner le même problème, c’est une opportunité pour que la relation amoureuse se développe en même temps que l’intrigue. Mes livres sont en général 60% romance et 40% suspense.

Lisa : Pour moi aussi c’est 60/40. Pour moi le suspense et l’amour sont indivisibles, ce sont deux faces de la même chose. Et souvent le type de suspense a quelque chose à voir avec le personnage. Si c’est une idée d’arme biologique, peut-être que l’héroïne est chimiste. Normalement c’est toujours la femme qui a la dernière clé pour résoudre le problème, et c’est le héros qui est l’arme qui va être lancée. Mais ils sont tous les deux ensemble pour éviter la fin du monde. C’est toujours quelque chose de terrible qui va arriver, désastre biologique, chimique, attentat terroriste, c’est presque toujours quelque chose d’énorme. Ils ont tous les deux un talent à exploiter, et ils travaillent ensemble pour résoudre le tout.

Public : Vous écrivez toutes depuis très longtemps ?

Olivia : Moi j’écris de la fiction depuis des années, parce que ça fait trente ans que je suis avocate. Avant j’écrivais le monde selon mes clients. J’ai une amie qui s’appelle Elle Casey. Un de ses livres, Surprise au bout du fil, est un suspense et c’est hilarant. Bref, Elle Casey, qui est aussi une avocate qui a mal tourné et est devenue écrivain, est venue chez moi et m’a dit « Je peux m’enfermer dans ta chambre d’ami pendant un mois ? J’ai un bouquin à écrire. » Heu, oui ? Et elle a publié son premier bouquin, puis son deuxième, puis son troisième, et depuis elle n’a pas arrêté et c’est devenu un auteur très prisé aux Etats-Unis. Et je me suis dit « Pourquoi pas moi ? » C’était en janvier 2013. La première année j’ai vendu 700 livres, donc même si on se fait 2€ par livre ça fait 1400€, c’est pas lourd. La deuxième année j’ai failli arrêter en me disant « Je vaux rien, c’est à chier. » J’en ai traduit un en français et je suis arrivée numéro 1 des ventes sur Amazon France, et je me suis dit « Peut-être que je ne suis pas si nulle, c’est juste que sur le marché américain, je n’ai pas de visibilité. » Un jour quelqu’un m’a proposé de participer à une anthologie dans laquelle on écrirait tous une histoire de bikers, j’ai commencé à écrire du suspense et j’ai trouvé ma voix. C’était une anthologie où on était dix à avoir écrit une histoire, et les dix étaient vendues ensemble à 0,99$, en partant du principe que vous êtes toutes des lectrices en série, et que s’il y en avait une que vous aimiez, vous alliez lire le reste de la série.

Scarlett : J’ai écrit mon premier livre, Strong, à la fin de 2013, et en 2014 j’ai vendu ma maison au Canada et déménagé avec ma famille en Angleterre, dans une nouvelle maison que j’ai rénovée, et j’ai fini le livre pendant cette période. Puis, comme c’était mon premier livre, j’ai trouvé un agent et un contrat avec St Martin Press, et le livre a été publié en 2015. Donc ça a été court pour être publiée. Le livre est sorti et il s’est vendu à 175 000 exemplaires en quelques semaines, parce qu’un gros blog en avait fait une bonne critique. Et c’était bon.

Olivia : En fait, le plus gros problème de celles qui commencent, ce n’est pas tant d’écrire un bon livre, enfin si, il faut écrire un bon livre, mais il y a des tas de bons livres qui sont classés 100 000e ou 200 000e dans les ventes Amazon, parce qu’ils n’ont pas de publicité.

Scarlett : J’ai eu tellement de chance que cette bloggeuse l’ait aimé, elle en a beaucoup parlé et elle a de nombreux fans qui ont suivi.

Olivia : Avec l’édition traditionnelle il y avait un filtre. Alors c’est vrai qu’il y avait moins de merdes, mais c’était une espèce d’élite qui déterminait si un bouquin était bon ou pas bon. Tandis que maintenant c’est vous qui le déterminez. S’il ne marche pas, ça peut ne pas être parce qu’il est mauvais, mais simplement parce qu’il n’a pas de visibilité. Mais si un bouquin est bon, même s’il est dans un domaine pour lequel aucun éditeur n’aurait été prêt à prendre le risque (c’est un risque pour l’éditeur car il fait l’avance, l’édition, l’impression), avec l’édition indépendante il sort quand même. Scarlett est publiée traditionnellement, mais Lisa et moi sommes essentiellement indépendantes, et c’est nous qui devons booster nos livres.

Lisa : Moi j’ai une histoire de souffrance qui date du Jurassique. J’ai écrit sept romans, le premier je l’ai réécrit huit fois, et j’ai une énorme pile de lettres de refus de maisons d’édition, et même d’agents. Finalement, en 1998, j’étais à Bruxelles et je travaillais comme interprète pour la Commission Européenne, on m’a appelé et on m’a dit « J’aime bien votre roman, est-ce que vous en avez d’autres ? » J’ai dit oui, j’ai tiré cinq romans du tiroir et je les ai publiés à la suite. Et depuis je n’ai pas cessé de publier. Maintenant je suis indépendante et j’aime ça, mais c’est très difficile. Pour moi ça en vaut la peine, mais je suis devenue indépendante en ayant déjà des lectrices, je n’ai pas commencé à zéro, et c’est plus facile. J’écris exactement ce que je veux, quand je le veux. Enfin ce n’est pas vrai, parce qu’il faudrait publier un livre par mois, et ce n’est pas possible.

Olivia : Scarlett disait qu’on pourrait parler des façons dont on fait les recherches pour nos livres. Pour celles qui lisent en anglais, Liliana Hart, qui écrit du RS, est allée à une conférence où elle a rencontré le chef de la police de Louisiane, et elle est repartie avec lui :) Quand il a pris sa retraite de la police, son mari nous a loué l’équivalent du centre d’entrainement du GIGN en Louisiane. On devait être une vingtaine d’auteurs, on a tiré à la carabine, on a fait exploser des trucs, on a appris à rentrer, on a fait comme dans Les Experts les trucs avec les scènes de crime etc. Moi ça a été ça ma recherche, avec une formation sur le terrain pour ne pas dire trop de conneries. On en dit forcément, mais on n’en dit pas trop. J’ai une autre amie, Cat Johnson, dont les héros sont des SEALs et elle envoyait des paquets aux types de l’Armée américaine qui étaient au front. Un jour un des types lui a répondu en disant « Qui êtes-vous ? » et elle a dit « Je suis romancière et mes héros sont des Navy SEALs. » Lui en était un, et il lui a dit de lui en envoyer. Il a lu les bouquins et lui a dit « Il y a des trucs qui vont, il y a des trucs qui ne vont pas ». Et il a ajouté un truc tout con « Les clés de la voiture que le mec met dans la poche, si tu avais des testicules tu saurais que c’est non. » Sourire On décrit des hommes alors qu’on est des femmes, et il y a des choses qu’on est obligées d’imaginer.

Scarlett : Quand j’ai commencé la série Love over duty, j’ai lancé une demande sur ma page Facebook pour savoir si quelqu’un connaissait une personne
dans la Navy, et quelqu’un a répondu « Mon ancien colocataire est dans les commandos. » Et il m’a mis en contact avec des SEALs à la retraite, et d’autres toujours en activité. Je leur envoyais des messages disant par exemple « J’ai besoin qu’ils choisissent une arme » et ils répondaient « On utilise cette arme », ou je leur demandais quelle est la procédure hiérarchique pour obtenir l’autorisation de faire quelque chose, et ils me le disaient. Donc j’ai écrit le premier livre avec leur aide, je l’ai envoyé à mes beta lectrices et elles ont fait la remarque qu’elles n’avaient jamais ressenti que l’héroïne était en danger. Donc j’ai parlé de ce retour aux SEALs qui m’avaient aidée, et ils m’ont répondu « Bien sûr qu’elle n’était pas en danger, on est des putains de SEALs. » Donc j’ai dû faire un compromis, et mettre quelqu’un d’autre en danger.

Lisa : Moi je fais partie d’un groupe qui s’appelle Crime Scene Writers et il y a de tout, des pompiers, des policiers, des commandos, des scientifiques, et j’ai aussi une conférence d’écrivains en Italie où j’ai invité plusieurs fois des agents du NCIS. J’ai écrit seulement un policier situé en Italie, à Sienne (Murphy’s law, non traduit), et je suis allée au commissariat pour poser des questions sur les procédures pour les homicides. Ils m’ont donné du café très bon et ils ont été très gentils, mais ils m’ont dit qu’ils avaient oublié, car la dernière fois qu’il y avait eu un homicide à Sienne c’était dix ans plus tôt. Je suis allée au commissariat à Naples pour un autre roman et là il y avait trois homicides par jour.

Public : Pourquoi quand il y a du suspense, qu’ils sont poursuivis, qu’ils se planquent dans un endroit sale ou sombre, ils font l’amour quand même ?

Olivia : Oui ça c’est l’adrénaline.

Scarlett : Est-ce que vous avez lu Julie Ann Walker ? Dans un de ses livres ils sont dans la jungle, avec des trucs qui rampent, des insectes et tout. J’ai eu une discussion avec elle lors d’une émission de radio, et je lui ai demandé comment elle casait les moments sexy là-dedans. Et on a fini par conclure que quand on a été poursuivi, attaqué, kidnappé, ou peu importe, les choses comme les insectes ou un endroit sombre sont sans importance, car on a échappé à quelque chose de bien pire.

Lisa : Il y a un auteur qui s’appelle Sherry Derr je crois, elle a écrit une scène où une héroïne a une relation sexuelle sur le dos d’un chameau.

Scarlett : Ils ne peuvent pas faire ça, ça ne marche pas Sourire


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